37- Le billet de la vérité

16/12/2023

Où est le billet de la vérité ?

Après avoir retiré un billet au distributeur, mon esprit fut détourné et je me rendis compte que je n'avais pas mon billet. Je pense que je l'ai peut-être rangé et que je l'ai oublié. Je fouille sur moi, mais je ne le trouve ni dans mon sac ni dans mes poches. Je pense que je l'ai laissé dans le distributeur et que je ne l'ai pas pris, mais il n'y est pas. Je pense que je l'ai fait tomber, je le cherche partout, mais je ne le retrouve pas. Et puis, je pense qu'on a dû me le voler alors que j'ai fait tomber mon porte-carte, que quelqu'un a dû en profiter pour le prendre. Je demande donc à visualiser les caméras de surveillance. Il semble que le plus probable est que la machine ait ravalé le billet, possiblement parce que je ne l'ai pas pris assez vite. Habituellement, un bip prévient, mais moi qui suis pourtant hypersensible au bruit, j'étais attentive à ce que me disait une vieille dame et je ne l'ai pas entendu. "À moins qu'il n'ait pas sonné". 

Quelle est la vérité ? 

Elle était celle à laquelle je croyais au moment où je la disais. Sur le moment, c'est la conviction qui fait la vérité. Si j'étais convaincu que le billet avait glissé sous une caisse, on aurait pu soulever toutes celles du magasin pour rien, si en réalité, on me l'avait volé. Si j'avais été persuadée que c'était tel personne la voleuse, parce qu'elle était la seule à côté à ce moment, alors elle aurait subi l'humiliation (et ses conséquences sociales et psychologiques) de ma croyance absolue, et ce, pour rien, si en réalité, c'est la machine qui a avalé le billet. 

La vérité, je la connaitrais quand en faisant les comptes des billets restants dans le distributeur, on se rend compte qu'il y en a un en trop. La banquière me contactera dans quelques jours pour m'informer des résultats. Pour le moment, la seule vérité qui est certaine, c'est que j'ai bien mené l'opération pour retirer un billet. Elle est enregistrée dans l'informatique. Ça, c'est vrai et on peut y croire. Ma première preuve est mon ticket de retrait. C'est une vérité. Ma seconde preuve est la vidéo de la caméra de surveillance. C'est une vérité aussi. Ma troisième preuve est la confirmation par ma banquière de l'enregistrement informatique de la transaction. C'est encore une vérité.

Maintenant, la vérité qu'il reste à savoir, c'est si le billet s'est envolé (et peut-être s'est retrouvé collé sous la chaussure d'un client du magasin qui l'aura transporté sans le savoir jusqu'au-dehors) ou si le billet a été avalé par la machine, qui l'aura repris, estimant que je n'allais pas assez vite pour l'attraper (procédure de protection). Ce sont donc les deux vérités les plus probables : envolée ou avalée. 

Cette petite enquête devrait être assez rapide et ne prendre que quelques jours. 

Quelle en sera la réalité ?

Lorsque je saurai la vérité, ma réalité sera différente selon cette vérité. Soit la machine a avalé le billet et dans ce cas, je serais remboursée, soit le billet s'est envolé et je ne le reverrais probablement plus, à moins qu'une personne ne le trouve et ne l'amène aux objets perdus du magasin, ce qui - même avec l'existence de gens encore honnêtes - a peu de chance de se réaliser, surtout si le billet n'est pas trouvé sur place, dans la quasi-immédiateté de sa perte. Plus le temps passe et moins il y a de chance de retrouver mon billet. 

Une pensée pour les personnes disparues, les victimes d'enlèvement. C'est tout de suite qu'il faut faire les démarches lorsqu'on se rend compte qu'une personne n'est plus là et qu'on s'en inquiète. Plus on va vite, plus on a des témoignages proches des faits dans le temps et l'espace. Plus on va vite et plus vite on mobilise des responsables : celui qui vérifie la présence de personnes sur les lieux via les caméras, celui qui inspecte les sols, celui qui recueille les témoignages. Plus on va vite et qu'on dit de suite ce qui ne va pas, plus vite les gens ont envie de se mobiliser pour vous aider car ils s'imprègnent de l'impact émotionnel que la situation a sur vous.

La vie m'a cependant prouvé que le temps peut œuvrer à nous rendre ce que nous avons perdu. Ma fille a un jour perdu son portefeuille avec 300 euros dedans. Quelques jours plus tard, quelqu'un l'a ramené aux objets perdus de la gare et pas un billet ne manquait. Je comprends mieux l'expression "Rendez à Cézar ce qui appartient à Cézar." Ce que vous volez vous sera repris d'une manière ou d'une autre et ce que vous donnez vous sera rendu également d'une manière ou d'une autre. Mon billet de la vérité a pris la forme d'un billet de 20 euros pour me faire comprendre la différence qu'il y a entre la vérité et la réalité. Cela m'a rappelé une interconnexion subjective il y a environ 4 ans, qui m'a fait savoir par un souvenir éclairé d'une connaissance émanant de l'au-delà, que les 20 euros que j'ai rendu à un monsieur (je les ai ramassé par terre dans un supermarché et je lui ai tapé sur l'épaule pour lui demander si c'était lui qui avait perdu son argent), appartenaient à un gendarme et que le geste l'a beaucoup touché. Oui, il y a encore des gens honnêtes. 

L'erreur est humaine (vérité), bien entendu, mais quand les erreurs de caisse sont régulières, c'est mon porte-monnaie qui en pâtie (réalité). Par contre, pour chaque caissière qui a reconnu son erreur, qui s'est excusée et qui a rectifiée son erreur en me remboursant, si à l'inverse, un jour, une m'a donné plus, je le lui ai dis et lui ai rendu, afin qu'elle n'ait pas un trou dans sa caisse. 

Certains appellent cela le karma. C'est l'impact de la vérité sur la réalité.

Quelle est la différence entre vérité et réalité ?

La réalité est une conséquence de la vérité.

Ce qui est vrai créera le résultat avec lequel je devrais vivre. Mon billet sera actif ou passif. Il sera rendu ou perdu, présent ou passé, en plus ou en moins. 
Si la vérité est que le billet s'est envolé, la réalité sera que je ne l'aurais plus.
Si la vérité est que le billet a été avalé par la machine, la réalité sera que je le récupèrerais.

Dans un collectif, la vérité est une réalité commune.


La vérité se dit, la réalité se fait.

La vérité est une croyance, la réalité est un fait.

La vérité est un besoin psychologique, la réalité, un besoin physique.

Les vérités sont des volontés, les réalités des possibilités.

Les vérités peuvent être erronées. Les réalités sont des certitudes qui peuvent se modifier si une vérité change. D'où le besoin de preuve. 

Une vérité est libre quand elle est capable de se remettre en question, de faire des mises à niveau, des mises à jour, autant dans ses applications que dans ses transmissions/traductions.

Soyons vrais autant que possible, avec un minimum de politesse afin d'aider et non de blesser.

La vérité doit servir et non desservir.


1er Résultat

La banquière m'annonce que puisque le retrait n'a pas été effectué dans le distributeur de ma banque, ma réclamation est annulée. Réalité : J'ai perdu 20 euros. Vérité : Elle n'est pas celle à laquelle je m'attendais. Que le billet se soit envolé ou qu'il ait été avalé, le résultat est le même : mon billet est perdu.  Ce qui change, c'est la raison pour laquelle je n'allais pas le récupérer : une raison administrative. Qu'importe la vérité, je comprenais qu'on n'allait pas la chercher, que même si une des deux était actée dans les faits, la réalité de ce billet resterait passive. 

Karma :  Un jour, un homme m'a volé tout un salaire, mais quand je m'en suis plainte, j'ai ajouté 20 euros sur le montant, pour la compensation du remboursement du préjudice que j'espérais. Le destin me le reprenait sous une autre forme, car il y avait une déviance dans la vérité. Elle n'était pas de beaucoup, mais si tout le monde faisait pareil, on en sortirait pas.

2ième Résultat

La banquière me téléphone. On s'est mal comprise en messagerie. Ce qu'elle annulait, c'était la demande de réclamation pour qu'un professionnel vienne vérifier le nombre de billets dans le distributeur, puisque le retrait n'avait pas eu lieu dans son distributeur. Elle m'annonce que dans ce cas, je devrais être remboursée d'ici quelques jours. La réalité a encore été modifiée et cette fois, la raison est : une incompréhension. 

Karma : Au moins en pensées, j'avais reconnu mon tort passé. J'étais à moitié pardonnée. La réalité peut encore être modifiée selon la vérité et ses raisons.

 En tout cas, elle le sera quand je serais remboursée ou plutôt si, car aujourd'hui, je sais qu'il est presque impossible d'avoir des certitudes. Le billet peut arriver sur mon compte et je pourrais clâmer que cette fois-ci c'est sûr, que je l'ai, mais ensuite, la banque pourrait me dire qu'ils ont fait une erreur et me le reprendre, ce qui annulerait ma certitude. 

La réalité peut encore être modifiée, qu'importe la vérité. C'est même ça qui est le plus difficile à encaisser. Si celui qui vérifie le nombre des billets dans le distributeur en trouve un supplémentaire et qu'il n'a pas envie de le dire, personne ne pourra prouver qu'il était bien dedans et je perdrais quand même mon billet. Mais si la personne est honnête, alors elle le fera savoir et je le récupèrerais. Dans ce cas, l'administration le saura et si c'est bien dit et bien écrit, alors on me remboursera.

Karma ? Celui dont j'avais réclamé 20 euros supplémentaires à son vol ne m'a jamais remboursé l'argent qu'il m'a volé. Les assurances ont payé une partie seulement de l'amende, somme, que j'ai de suite donné à une personne dans le besoin, qui m'avait aidé financièrement quelques mois plus tôt, même si sans obligation de remboursement. Je ne faisais que lui rendre justice. Si je récupère ce billet de 20, ça sera peut-être le karma dans la balance de celui que j'ai trouvé par terre à la caisse d'un magasin et que j'ai redonné à ce monsieur qui l'avait perdu (le gendarme).