42- Influence (2)

08/01/2024

Entre le visible et l’invisible, il existe des esprits et des pensées, des idées et des intentions, ainsi qu’un jeu d’influence conscient ou inconscient. Quelles que soient nos convictions, nous pouvons évoluer et changer de mentalité, comme on change de chemise. L’individu est une version humaine capable de changer sa propre version, soit pour le mieux, soit pour le pire, en fonction de son état d’esprit et des influences qu’il subit.

Ces influences peuvent être environnementales, mentales/spirituelles, internes ou externes. Nous pouvons tous être des influenceurs ou des personnes influençables, des manipulateurs ou des personnes manipulées. 

Versions de soi-même

Cela fait plusieurs fois que 'j'entends parler des "versions de soi". 

* Par des particuliers : 

- "Je croyais qu'elle voulait être une meilleure version d'elle-même !"

- "Sur Terre, il y a plusieurs versions d'êtres humains".

* Dans des films de science-fiction, avec réincarnation et multimers

- Retour vers le futur, Les 7 vies de Léa, Kundun, Dogma (2000), Drôles de fantômes (1993)

- Si j'étais toi (2007), Cloud Atlas (2013), Le premier pouvoir (1990), etc.

Est-il possible d'avoir plusieurs versions de soi à travers l'espace-temps ? Réfléchissons.

L'être humain est la variable du verbe qu'il représente. Il est composé d'une racine et d'une terminaison (une naissance et une mort), qui varient selon les causes et les effets. L'humain est un verbe, le verbe "être".

« Le verbe est un mot qui se conjugue : il varie en mode, en temps, en voix, en personne et en nombre. » L'être humain est flexible. Il se conjugue selon le mode, le temps, la voix, la personne. Cité par Wilmet, dans "Le bon usage"

Jeux de la flexion

Lorsqu'on rencontre une personne, en principe, on ne se demande pas ce qu'elle est ; on le sait : elle est humaine. Ce qu'on apprend, c'est à la reconnaitre par son identité corporelle, psychique, administrative et culturelle. 

L'humain étant un verbe (être), il est flexible et variable. Il change de forme : 

* Selon le contexte d'utilisation : prise ou perte de poids en fonction des humeurs ; augmentation ou diminution de la tonalité de sa voix selon le lieu où il se trouve (devant un bébé qui dort, lors d'un karaoké),  

* Selon la grammaire humaine : expression de l’humeur (tristesse, joie, peur, colère, surprise, etc.) ; description des émotions (« Je me sens », « Ça me fait », « Je réalise », « Je ressens », « Je perçois », etc.) ; comparaison avec les autres verbes « être » et leurs dérivés linguistiques ; étude de ce qui est commun et des origines ; intégration des différences ou remplacement des siennes si les méthodes de communication sont jugées plus efficaces, etc.

L'amour des mots du verbe dépasse la simple étude de l'intelligence humaine. La langue "être" n'est pas prescriptive, elle est descriptive. Elle ne cherche pas à imposer une norme, elle décrit seulement ce que c'est. 

L'être humain est un verbe qui peut être transitif ou intransitif. 

Si on le voit parler avec quelqu'un, il est transitif. Exemple : Il parle avec toi. 

S'il parle tout seul, il est intransitif. Exemple : Il parle.

- L'humain parle à une ou plusieurs personnes, qui sont visibles et extérieures à l'extérieur de lui. - IL PARTAGE.

- Il se parle à lui-même à voix haute (extérieure) ou en voix intérieure (dans sa tête) - IL RÉFLÉCHIT.

- Il parle à un ou plusieurs êtres invisibles (personnes décédées, divinités, personnalités réelles ou imaginaires). IL S'IMAGINE OU PRIE LES MAGES.

Lorsqu’on réfléchit, on utilise les deux hémisphères du cerveau : celui de droite et celui de gauche. Celui qui domine le langage est généralement celui de gauche. L’hémisphère droit s’occupe de la vision spatiale et de la perception des visages ; il y a donc une association entre ce que l’on dit et ce que l’on voit, entre ce que l’on entend et ce que l’on perçoit. C'est par la réflexion que l'on peut discerner ce qui nous distingue et ce qui nous différencie des autres. C'est la réflexion qui nous éclaire sur notre chemin, devant laquelle on s'agenouille. Elle est comme une nouvelle naissance qui peut prendre diverses formes.


Fête du vaudouisme au Bénin. Les pratiquants croient que l’âme des morts se transforme en divinités qui peuvent aider les vivants qui le leur demandent. Bizarrement, le vaudouisme est un mélange de polythéisme et de monothéisme : ils croient en un Dieu unique, mais ils croient aussi aux petits dieux, c’est-à-dire aux défunts qui se divinisent après leur mort. Les adeptes du Vaudou croient en l’incarnation d’ancêtres dans le nouveau corps à naître et pensent que les anciens peuvent communiquer au travers des êtres vivants.  

Les religions du monothéisme parlent d’un processus de survie après la mort et d’un retour à la chair. Selon les chrétiens et les musulmans, seuls un messager ou un Dieu possèdent cette capacité. Les bouddhistes (qui croient en un esprit universel) désignent une transmigration des âmes à travers d’autres corps, qui peuvent être aussi bien animaux que végétaux. 

Les théories antiques, grecques ou indiennes parlent de métempsychose, de déplacement de l’âme, tout comme dans le judaïsme, le catharisme et d’autres courants animistes. Cela implique un changement d’état, des incarnations successives de la mort à la vie ou de son vivant. Chaque nouvelle conscience majeure est comme une nouvelle incarnation de soi en soi.

Roger Wolcott Sperry (Prix Nobel de physiologie ou médecine en 1981) et Michael Gazzaniga ont démontré que les hémisphères cérébraux humains séparés (par callosotomie) pouvaient fonctionner de façon indépendante et aboutir à des raisonnements distincts à partir des influx qui parviennent à chacun de ces hémisphères. Sperry a émis une hypothèse très débattue selon laquelle il y aurait des personnalités ou des formes de conscience distinctes au sein de chaque hémisphère.

https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9misph%C3%A8re_c%C3%A9r%C3%A9bral

Cette dualité influence notre perception et notre pensée. Elle nous permet de nous remettre en question. C’est l’union du savoir et du dire, une identité synchronique. Cependant, cette conscience n’est pas toujours suffisante : nombreux d’entre nous cherchent ce qu’ils incarnent, en fonction du sentiment d’être ou pas accomplis en tant que soi, selon le sentiment de notre identité (familiale, régionale, nationale, terrienne, universelle). L’identité peut parfois se confondre avec des entités (idoles, ancêtres) ou la complexité d’une unité (groupe, religion). C’est la capacité à comparer les différences qui fait la réalité synchronique. 

Exemple 1 : un bateau est endommagé. Il est reconstruit à l’identique. Il lui ressemble, c’est le même et pourtant, ce n’est pas le même matériel. Nous savons que le nouveau n’est pas le même qu’avant. (Bateau de Thésée)

Exemple 2 : Un père et son fils se ressemblent comme deux gouttes d’eau, mais nous savons qu’ils ne sont pas une seule et même personne ni des frères ni des clones, mais seulement un père et un fils. (Idem pour les jumeaux.)

Exemple 3 : Un homme meurt et sa femme continue à lui parler. Elle sait qu’il n’est plus là, mais elle garde un contact avec son esprit, qu’elle pense être présent quelque part. La nature de la relation qu’elle entretient est spirituelle (et non pas hallucinatoire).

Exemple 4 : Quelqu’un qui prie Dieu. Il ne le voit pas, mais il est certain qu’il est là. (Croyance)

Exemple 5 : On a une opinion, puis on change d’avis. On a une nouvelle opinion, mais on sait qu’elle est différente de la précédente. (erreur, remise en question)

La valeur que l’on accorde à nos idées, nos perceptions et nos pensées détermine notre nature psychique, composée d’images acoustiques intérieures. Cela fait de la parole une double entité psychique très proche. Nos sens impliquent donc la présence d’un univers qui nous unit à lui dans une totalité qui soit nous échappe, soit nous rapproche. Soit on se sent comme faisant partie de cet univers dans lequel nous sommes, soit nous nous en sentons comme séparés. C’est probablement pour cette raison que certains d’entre nous remplacent le mot « univers » par les mots « Dieu », « esprit », « dimension », « expérience », etc. Le lien qui nous unit alors devient l’arbitre d’une vérité qui n’est pas apparente, mais qui peut être influencée par des règles cultuelles et dogmatiques.

L'être humain est un être qui pense, qui s'expérimente lui-même et qui prend conscience de sa propre pensée.

Et nos pensées changent, notre conscience change. Nous sommes constamment en train de muer, de muter, de nous réincarner. Le serpent change de peau régulièrement. L’humain aussi. Sa peau, c’est l’eau de notre corps qui se renouvelle fréquemment. Nous en sommes composés à environ 75 %. On boit, on élimine. On s’arrose (douche), on se trempe (bain), on avale, et on transpire, on salive, on urine. Comme l’eau qui rejette le sable sur la rive, notre peau perd constamment de la matière. Elle se modifie pour se recréer identique à elle-même ou avec des différences, en fonction de l’alimentation, de nos émotions et des conditions de vie dans lesquelles elle se trouve. 

Notre esprit aussi se modifie. Il s'améliore ou s'empire, il grandit ou se rétracte. Il vit dans sa chair, siège de son âme. L’esprit ne reste pas toujours dans le corps. Quelquefois, il part « dans la lune », il sort « dans les astres » ou il se décorpore. Pour certains, c'est du délire, car cela ne leur est pas arrivé (ou ils ne s'en souviennent pas) et pour d'autres, c'est la réalité.


En conclusion, je dirai qu’il faut se méfier des fans trop fan. On peut aimer, admirer et respecter, mais quelqu’un qui ne vit plus que pour une autre personne au détriment de tout le reste est soit sous l’emprise de cette dernière, soit fanatique, ce qui peut être dangereux pour lui-même ou pour les autres.

La fascination d'un yogi pour les Dieux peut être un obstacle dans l'atteinte du Brahman : « Celui qui se laisse fasciner par un Dieu, si grand soit-il, a plus de peine à conquérir Brahman que le ver de terre qu'attend encore une évolution infinie. C'est pour cela que tout en adorant avec ferveur Shiva, la Mère Elle-même, le yogin ne doit jamais cesser de garder à sa conscience l'unique et prédominante nostalgie de l'Absolu. Alors son adoration de Shiva, de la Mère [Aditi] ou de n'importe quel autre Dieu le conduira au But de sa course. »

Source : Quelques aspects d'une sādhanā, de Ma Suryananda Lakshmi, Albin Michel, 1963, p. 117 : référence à L'Enseignement de Râmakrishna, Albin Michel, Paris, 1949, 1490-1491.

Une religion est un enseignement qui ne doit jamais être un poids. Si elle vous donne un sentiment d’obligation ou de mal-être, alors la meilleure chose à faire est de partir. 

Une relation de couple, qu’elle soit maritale ou non, est comme une religion. Elle ne doit pas vous laisser une impression d’oppression. Sinon, il y a possibilité d’emprise et de mauvaise influence. 

Si la relation vous coule, lâchez-la.


Dans un autre registre, l’existence d’un multivers nous ferait exister dans plusieurs mondes, dans des versions différentes. Dans tel monde, je suis peut-être un commissaire de police indien ; dans un autre, je suis infirmière polonaise ; dans untel, je suis une nonne italienne ; dans l’autre, une caissière américaine ; dans un monde, je suis cavalière de dinosaure et je vis dans une grotte de la préhistoire ; dans un autre, je suis une reine d’Égypte dans l’Antiquité. Dans encore un autre monde, je vis peut-être en l'an 10003, où nous côtoyons des extraterrestres et voyageons par la pensée. 

Peut-être pouvons-nous nous incarner dans la version de notre choix pour mieux comprendre une étape de l’histoire. Les incarnations seraient alors des cours d’histoire-géographie, de sciences humaines ou de mécanique. 

Peut-être les versions des autres mondes nous permettent de nous améliorer toutes ensemble. 

Peut-être avons-nous tous 144 versions de nous-mêmes. 

Peut-être que nos améliorations dérangent certains groupes de personnes qui ont le besoin de garder le contrôle sur les peuples. Lorsqu’une personne devient trop bien améliorée à leurs yeux, ils leur font courir le risque de permettre aux autres de progresser et de ne plus accepter ce que tout esprit éclairé refuserait. Alors, ils se déchaînent pour lui faire de l’ombre, pour l’étouffer, l’isoler et la faire taire. 

Peut-être qu’il existe des versions lumineuses qui travaillent ensemble pour sauver d’autres versions lumineuses, afin de préserver la belle part de l’humanité.