45- Le Sphynx et l'Ecclesia (1)
Σφίγξ
Le début d’une rencontre correspond aux premières observations qui seront caractérisées par du hasard, de l’incertitude ou un phénomène climatique (humeur météo de l’être et de la nature).
Lorsque j’ai fait des recherches sur le Sphynx dans un précédent article, j’ai compris que son mythe était basé sur sa fonction spécifique : celle d’un distributeur de probabilité. Dès la première lettre de son nom, qui en grec est « Σ », on comprend qu’il s’agit d’un agent de sécurité qui est là pour distinguer la manière dont s’exprime celui qui désire entrer. Il vérifie non seulement la correction du langage, mais aussi l’esprit. Il ne voulait certainement pas laisser passer une personne ivre ou délirante. Il était en quelque sorte le représentant de la syntaxe d’entrée. La qualité de sa perception était aussi efficace que celle d’un nombre d’or « φ ». Il calquait la syntaxe sur la logique en vérifiant l’art de parler d’une personne. De nos jours, on apprend cela dans le cadre du cours de Grammaire générale et raisonnée du Port-Royal. Ce cours aborde les aspects de la grammaire du français et la philosophie de l’esprit, inspirée des « Règles pour la direction de l’esprit dans la recherche de la vérité » de Descartes.
Wikipédia : "Toutes nos connaissances ont lieu à travers des idées qui reflètent les choses et le jugement porté sur ces choses s'exprime dans des propositions grammaticales constituées par un sujet et un prédicat [réf. nécessaire]. La validité des propositions obtenues par déduction dépend du respect des règles syllogistiques. Enfin, l'ordonnancement des jugements et conclusions conduit à la science par le biais de la méthode (analyse et synthèse).
C'est aussi une étude du raisonnement passionnel :
« Si on examine avec soin ce qui attache ordinairement les hommes plutôt à une opinion qu'à une autre, on trouvera que ce n'est pas la pénétration de la vérité et la force des raisons, mais quelque lien d'amour-propre, d'intérêt ou de passion. C'est le poids qui emporte la balance. (...) Nous jugeons les choses, non par ce qu'elles sont en elles-mêmes, mais par ce qu'elles sont à notre égard ; et la vérité et l'utilité ne sont pour nous qu'une même chose. »
— Logique de Port-Royal, III, ch. xx, p. 261
La logique ou l’art de penser du Port-Royal était enseignée au « Jansénisme » (J’enseigne = Jansén ? Prisme de l’enseignement ?) et contenait des règles pour guider l’esprit méthodiquement dans les activités de réflexion et les sciences, afin d’éviter les erreurs. Quand j’entends parler des problèmes actuels dans les écoles, je me dis que si les professeurs ne sont plus respectés et que les élèves s’entre-tuent, c’est peut-être qu’ils manquent d’un enseignement leur permettant de développer leur raisonnement.
C’est pourquoi, en revenant au Sphinx, on peut comprendre qu’il devait faire attention aux signes en distinguant les signes certains des signes probables, les signes naturels et les signes établis en tant que résonance d’un symbole établi, d’une institution ou d’un établissement. Le signe est la reconnaissance d’une signature. Si je me regarde dans le miroir, je suis le signe naturel de moi-même, sauf si je suis masquée par différents artifices ou par une tristesse qui n’est pas innée.
La théorie du signe est liée à la nature de la connaissance et à sa relation au monde. En observant une personne, en regardant ce qu’elle connait et les liens qu’elle a avec le monde, on apprendra à la connaitre et à reconnaitre sa signature, mais aussi, ses faussaires qui ont voulu l’imiter, les « copycats ». On verra aussi qui l'aime et qui la harcèle, qui lui veut du bien et qui lui veut du mal.
Comment connaitre la version d'une personne ?
Questions :
- Généralement, qui est la personne ? Quelle est sa grammaire générative ? Que génère-t-elle ? Peut-on distinguer ses compétences de ses performances ? Quel est le courant transformationnel de la personne ? Quelles transformations ont été opérées dans sa structure profonde ? Comment s’est-elle formée ? Pourquoi a-t-elle changé de position ? Dans quel contexte ? Actif ou passif ? Comment la personne décrit-elle les choses ? Comment les explique-t-elle ?
- Ce qu'elle commence, elle l'abandonne ou elle le maitrise ? Que sait-elle construire et que comprend-elle ?
- Est-elle capable d'expliquer les variations de son propre esprit ? De sa vie ? De son être ?
- Quelle est la représentation mentale de sa raison ?
Lorsque l'on fait face à quelqu'un, il y a ce que l'on voit en surface et ce qu'on voit en profondeur. Vous voyez ou vous ne voyez pas ? Do you see or don't you see ?
- Quelle est la grammaire de dépendance de la personne ? Quel est son intérêt croissant ? Que va-t-elle chercher à extraire ? (D'ailleurs vers elle ? Si j'ai une dépendance au tabac, je me déplacerais et j'irais chercher ce tabac que je ramènerais chez moi ou j'enverrais quelqu'un le faire pour moi.
- Qu'est-ce qui est nécessaire pour moi ?
- Qu'est-ce que je recherche librement ou pas ?
- En quoi la personne est-elle catégorique ? Comment analyse-t-elle ?
- Quel est son modèle de langage ? Est-elle formelle ?
- Comment ordonne-t-elle ses pensées ? Comment note-t-elle les évènements ?
- Y a-t-il adjonction ou substitution ? (du signe, du signifiant et du signifié)
Après toutes ces questions, je me permets de partager ci-dessous un rêve que j'ai fait il y a quelques nuits. C'est ce rêve qui m'a amenée à effectuer des recherches sur le Sphinx.
1er mai 2024 – nuit
Je rêve que je quitte un domaine la nuit. C’est un château sombre, si sombre que je ne le vois pas, mais je sais qu’il est là derrière moi, vide de toute présence humaine, derrière les grilles que je ferme derrière moi. Je monte sur mon vélo, mais je remarque qu’il n’a pas de panier ni de caisse. Puis je vois un chat dans l’entrée du château, devant. Il est sérieux, droit, beau, costaud et royal. C’est mon chat, mais ce n’est pas mon chat. Je me demande comment je vais le transporter, car je n’ai pas de sac à dos ni de paniers ni de caisse. Je comprends que je dois le laisser, car il appartient au lieu, et je le serre contre moi avant de partir. Je monte sur le vélo et je pédale vite. Je descends une côte qui tourne.
Et je me réveille.
Interprétation
Première idée : il fait nuit, alors cela ne peut pas être bon. Cependant, même si je savais que je devais vite quitter cet endroit, je ne ressentais ni panique ni grande crainte. Quelque chose était angoissant, mais je savais que je quittais un lieu que je ne reverrais plus.
Secondo : le chat m’avait aidée à quitter ce château sombre en pleine nuit. Il était comme un vieux sage éternellement jeune, un guide, mais il devait rester à l’entrée, comme s’il était le gardien.
Trois : Je ne voyais pas le château, car il n’y avait aucune lumière. Il devait symboliser mon inconscient, un désir inassouvi, car indéterminé et sans doute ma mémoire confuse.
Quatre : le château noir représente l'enfer d'un destin fixé, vide, sans pont ni retour. Il semble que j'y étais seule, comme errant sans fin, mais le chat m'a guidée vers la sortie et j'ai vite quitté ce lieu grâce à un moyen de transport rapide, un vélo dégagé de tout poids ; et ça, c'est positif. C'est un cauchemar qui finit bien.
Après quelques heures de recul, je fais un lien entre ce rêve et le mythe du Sphinx, gardien du temple où celui qui veut passer doit répondre à une énigme. Dans ce rêve, je n’ai pas besoin de résoudre une énigme pour entrer puisque j’en sors. Cela peut signifier que l’énigme a été résolue.
Le Sphinx est né des amours de Typhon et d'Échidna. Avec son puissant corps de lionne, sa queue de dragon, sa belle tête de femme et ses ailes d'aigle, il constitue un exemple type dans la tératologie grecque. Nous associons surtout le Sphinx à l'idée d'énigme à cause de l'histoire d'Œdipe. Installé sur le mont Phicion, ce monstre femelle pose sa célèbre devinette aux voyageurs : « Quel est l'animal qui a quatre pieds le matin, deux à midi et trois le soir ? » Œdipe, qui va vers Thèbes, encore tout ému du meurtre de Laïos, répond sans hésitation qu'il s'agit de l'homme : dans son enfance, il se traîne à quatre pattes, à l'âge adulte, il se tient debout, et dans sa vieillesse, il s'aide d'un bâton. À la suite de la découverte de l'énigme, le monstre qui terrorisait la région de Thèbes se jeta du mont Phicion (φίκιον). Certaines statues en marbre qui mettent en relief la puissance et la beauté féminine du Sphinx parviennent à dissimuler la force destructrice et la nature dévorante qu'il incarne. Serait-ce pour cette raison que d'autres représentations de ce face-à-face provocateur suggèrent une signification différente, telle cette image d'Œdipe assis tranquillement à ses pieds, coiffé de son chapeau de voyage, l'air intrigué, pensif et nonchalant, mais nullement effrayé par cette créature antagoniste ? https://books.openedition.org/pupvd/35457?lang=fr
Le mot « sphinx » vient du verbe grec « sphíngō », qui signifie « serrer, resserrer ». J'ajouterais « contracter ». Le sphinx est le gardien d'une tombe royale ; dans mon rêve, le gros chat est le gardien du château = du royaume.
Le mot Sphynx est dérivé du sanskrit sthag, en pali thak, signifiant « dissimulé», parce qu'il garde des connaissances sacrées que lui ont enseignées les muses ; il était le gardien des archives de la justice, du livre des morts…Voilà, je crois que je viens de résoudre une autre énigme.
Le Sphynx est rattaché à la légende d'œdipe. Vu l'état de mon pied dans la réalité, il doit y avoir quelque chose de non résolu avec le complexe œdipien si je m'en tiens à la psychologie freudienne. Je n'ai pas vaincu le sphinx, mais la résolution de son énigme m'a permis de bénéficier de ses enseignements, ce qui ne fut pas de tout repos…
Il est dit aussi que le Sphynx empêchait les morts de sortir. Alors, soit je suis morte et il m'a laissé partir parce que j'avais résolu l'énigme, soit il m'a laissé entrer pour parler aux morts, et une fois qu'il m'a assez instruite, il m'a laissé partir.
Si le Sphynx est une allégorie de la mort, il est aussi celle de la justice des dieux. Oedipe est reconnu en tant que transition entre les anciennes pratiques religieuses et la montée des nouveaux dieux de l'Olympe. Je suppose symboliquement que j'ai quitté l'ancien (le royaume des morts) pour me joindre au nouveau, une sorte de rituel de passage. Le fait que je quitte le royaume et que je descends une côte à vélo peut être interprété comme le signe d'une réincorporation. En somme, je suis peut-être en train d'être accouchée (lol). Peut-être par la sage-femme que j'ai rencontrée au carrefour l'autre jour ? Dans la symbolique, il y a un retour avec un nouveau statut, paré d'une nouvelle sagesse et de ruse intellectuelle (alias « la Métis » : capacité à se mettre dans la peau de l'autre et à adopter sa vision du monde).
En Inde, on croit qu'en entrant dans le temple du Sphinx, les péchés d'une personne sont effacés et que le mal en général est conjuré.
Dans le contexte historique, Œdipe a libéré la ville de Sphynx au cours de la guerre de succession de sept chefs et de leurs héritiers, les Épigones, qui se battaient pour s'emparer du trône. C'est l'histoire de sept frères en guerre pour un tombeau royal, une tragédie survenue après la mort de leur père, à cause d'une querelle sur la sépulture. L'orgueil a emporté leur histoire par les talons. Un voulait que le corps du père soit enterré en terre comme il le désirait (ou laissé au soleil par vengeance ?), l'autre voulait un tombeau digne d'un roi, par amour pour son père (ou pour montrer sa grandeur ?). Il y a une expression qui dit que l'on part les deux pieds devant lorsqu'on meurt. Est-ce à voir avec le talon ? Quand la mère d'Achille le plonge dans le fleuve des Enfers, elle le tient par le talon. Le fleuve des enfers représente le courant de la mort, l'onde de mémoire où glissent les esprits. Tout le monde n'en revient pas. La légende veut aussi dire qu'Achille est mort par cette flèche dans le tendon, mais qu'il est revenu de la mort par ce même tendon/talon. Il est dit qu'Achille n'a pas existé, mais peut-être était-il le surnom d'Œdipe et que les deux ne font qu'un ? Œdipe, tué par le talon, s'est retrouvé face au gardien des morts, le sphinx, devant qui il devait résoudre une énigme et accéder à certaines connaissances pour pouvoir retourner d'où il venait, en se réincarnant. La réincarnation ne signifie pas nécessairement « revenir dans un nouveau corps de bébé ». On peut revenir dans son propre corps, lorsqu'on est déclaré cliniquement mort, mais qu'on revient à la vie.
Le dernier caractère du mot « Sphinx », le « xi » (ξ), provient de l’alphabet phénicien et a été inspiré au peuple cananéen par le hiéroglyphe appelé « Pilier Djed ». Il s’agit d’une représentation d’un arbre en fleurs ou d’un pilier ayant une signification anatomique. Dans le cas présent, le sphinx représente un pilier sacré du tombeau royal, puisqu’il se trouve près de la colonne vertébrale du défunt et qu’on l’identifie lui-même comme étant une colonne vertébrale, symbole de stabilité. Le pilier Djed était offert aux pharaons par les dieux et ils l’érigeaient en leur honneur. Censé protéger les vivants, il représente l’avatar égyptien de l’arbre de vie, garantissant la résurrection du mort.
En clair, le Sphinx était un saint Pierre, gardien des portes du paradis. Il était l’agent de sécurité qui laissait passer les âmes et décidait du chemin qu’elles allaient emprunter en fonction de la logique de leur esprit. Toutes devaient passer par le fleuve des enfers (= le miroir de Narcisse ?).
Le Sphinx est donc lié à la légende d’Œdipe, mais aussi au talon d’Achille et à l’art de parler et de penser. Il était décideur du chemin que prendraient les défunts : celui de la résurrection ou du non-retour.
Le Sphinx est une allégorie de la mort ou de la justice divine. Il demande à chacun de résoudre sa propre énigme, de connaître l’histoire de son talon, de se connaître soi-même et de reconnaître les signes de son être, sa propre signature. L’énigme du Sphinx est un test de notre philosophie de vie : quelle est votre vision humaine ? Arriverez-vous à vous reconnaître vous-même ? Que représente la dignité pour vous ?
Le Sphinx était un penseur, un parleur et un être de réflexion important. L’une des lettres de son nom signifie « Phi », pour philosophie. Et si le Sphinx était un homme ?